L'Envers et l'Endroit est la première œuvre d'Albert Camus, publiée à Alger en 1937 par Edmond Charlot et constituée d'une suite d'essais sur le quartier algérois de Belcourt ainsi que sur deux voyages, le premier aux Baléares et le second à Prague et Venise.

Référence : Albert Camus, "L'Envers et l'Endroit", éditions Gallimard/NRF, collection Blanche, 1937 (première édition)
 

Présentation générale

* Les nouvelles présentées
  1. Préface.
  2. L'ironie.
  3. Entre oui et non.
  4. La mort dans l'âme
  5. Amour de vivre
  6. L'Envers et l'Endroit
* La préface de 1958

Dans une préface écrite en 1958, importante pour Camus qui a tenu à cette mise au point, à ces précisions, il situe ces textes par rapport à ses écrits postérieurs, concluant ainsi : « Si j'ai beaucoup marché depuis ce livre, je n'ai pas tellement progressé ». C'est après une longue réflexion et quelques réticences qu'il a consenti à cette réédition et la préface qu'il peaufina pendant des années, considérant que, malgré les imperfections de forme, tout le monde devait pouvoir accéder facilement à ce texte et pas seulement des privilégiés pouvant sa procurer le texte original.

Présentation générale 

Dans la préface à la réédition, Albert Camus dira de cette œuvre de jeunesse qu'elle est la source secrète qui a irradié sa démarche : « Pour moi, je sais que ma source est dans L'Envers et l'endroit, dans ce monde de pauvreté et de lumière où j'ai longtemps vécu et dont le souvenir me préserve encore des deux dangers contraires qui menacent tout artiste, le ressentiment et la satisfaction. »

A cette époque, Camus a quelque vingt-deux quand il écrit ces cinq nouvelles très fortement autobiographiques : le quartier algérois de Belcourt et le misérable foyer familial que mène à la baguette sa terrible grand-mère qui domine une mère lointaine et silencieuse dont Camus se souvient de son effacement, ses silences prolongés, sa place devant la fenêtre à contempler la rue, personnage principal de la nouvelle Entre oui et non. Il évoque aussi son voyage aux îles Baléares, Minorque berceau de sa famille maternelle ainsi que son voyage à Prague dans La mort dans l'âme.

On découvre les vies étriquées de son quartier marquées par la dureté de l'existence, qu'on retrouvera dans L'Étranger : « Ce quartier, cette maison! Il n'y avait qu'un étage et les escaliers n'étaient pas éclairés. Maintenant encore, après de longues années, il pourrait y retourner en pleine nuit. Il sait qu'il grimperait l'escalier à toute vitesse sans trébucher une seule fois. Son corps même est imprégné de cette maison. Ses jambes conservent en elles la mesure exacte de la hauteur des marches. Sa main, l'horreur instinctive, jamais vaincue, de la rampe d'escalier. Et c'était à cause des cafards. »

Meursault vit dans ce même quartier, un petit appartement sans confort, les amis et la plage pour tout loisir, avec cette mère soumise à de durs travaux toute la journée et qui, le soir venu, contemple sans rien dire le va-et-vient de la rue, bouleversé par « l'admirable silence d'une mère et l'effort d'un homme pour retrouver une justice ou un amour qui équilibre ce silence ». Ce recueil se situe quelque part Entre oui et non de sa nouvelle, où l'Envers symbolise l'angoisse devant l'étrangeté, au silence du monde, la difficulté d'avoir en emprise quelconque sur ce monde qui l'entoure; l'Endroit est cette beauté qui permet d'accepter un monde qu'il ne comprend pas.

Meursault dans L'Étranger balancera entre ces deux pôles, double d'un Camus écrivant « qu'il n'y a pas d'amour de vivre sans désespoir de vivre » dans Entre oui et non. Il y a cette beauté éphémère d'un coucher de soleil qui ne peut trouver d'explication que dans cette ambivalence qui représente l'endroit et l'envers. Il n'y a guère que le groupe, qui, comme dans La Peste puisse dépasser l'individu, développer une solidarité permettant de lutter contre la solitude et rendant les hommes plus forts.

Entre oui et non, au-delà de cet amour de vivre » dont il parle dans l’une de ces nouvelles, dans les différents individus, ces vieillards ou cette femme  dans un dernier texte qui donne son titre au livre, font sans bien s'en rendre compte, eux-mêmes leur propre malheur, plongeant dans 'l'envers' comme dans un cercle vicieux.

                    

"Si la solitude existe, ce que j'ignore, on aurait bien le droit, à l'occasion, d'en rêver comme d'un paradis." L'envers & l'endroit

Voir aussi
<<< Christian Broussas - Camus, L'envers & l'endroit - 5 avril 2012 << © cjb © • >>>